Et maintenant?
J’ai coché la case.
La plus grosse.
Celle qui me hantait, me motivait, me guidait depuis 18 ans.
Et sur laquelle je travaille consciemment depuis 10 ans.
Dix ans de choix alignés avec ce rêve.
Dix ans à bâtir une version de moi capable de l’affronter. Et à me rappeler, chaque jour, qu’on est TOUS capables de plus qu’on pense.
Je dois l’avouer : j’ai tellement appris à travers ces années… Et si, au fond, nos rêves étaient là pour ça? Pour nous transformer, nous faire grandir et nous permettre de devenir une meilleure version de nous-même?
Badwater.
Une course mythique.
135 miles à travers la Vallée de la Mort.
L’endroit le plus chaud sur Terre, au moment le plus chaud de l’année…
Je suis tombée dessus un peu par hasard. À une époque où je ne savais même pas encore tout ce que j’étais capable d’endurer. Et je me suis dit, sans trop savoir pourquoi : Un jour, je vais la faire…
J’ai tenu cette promesse. Celle que j’avais faite à moi-même. Et celle que j’avais faite à ma mère, avant qu’elle nous quitte trop tôt et beaucoup trop jeune…
J’ai traversé cette ligne d’arrivée. En larmes. Et après des années de relation difficile avec elle (ma mère), c’était comme un geste d’amour. Une façon de faire la paix. Comme si ce rêve-là… c’était aussi un deuil.
Mais ce que je n’avais pas prévu…. C’est ce fameux : et maintenant? Je l’avais pressenti dans les dernières semaines… sans jamais trouver la réponse.
Badwater, ce n’est pas juste une course. C’est une traversée. Un face-à-face avec soi-même qui peut faire peur…. Un moment où tu ne peux pas cacher — ni avec le désert, ni avec toi-même.
La chaleur t’arrache tes repères. Les kilomètres t’enlèvent toute illusion de contrôle. Tu ne domines pas Badwater… tu apprends à coexister avec elle. Tu deviens comme une partie du désert.
Tu laisses tomber l’ego. Le plan. La performance, quand ce n’est pas la journée parfaite….
Tu n’as plus que ton souffle, ton esprit, ta volonté.
Et parfois… même ça devient fragile.
J’ai eu peur.
Mon corps a gonflé (beaucoup de rétention d’eau…ENCORE). Mes mains, mes jambes. J’ai eu froid . J’ai eu des vertiges. De la confusion. Des maux de tête. J’ai vomi .
Mais jamais, jamais, je n’ai pensé abandonner.
On ne DNF (did not finish) pas Badwater… sauf si t’as vraiment plus rien à donner ou que ta santé est vraiment en péril…ce qui explique le haut taux de FINISHERS!!!
Alors j’ai continué, j’ai tout donné.
Pas pour performer.
Pas pour le chrono.
Mais, pour me rendre.
J’aurais peut-être voulu que ce soit plus « smooth »…Mais je crois que ça devait être exactement comme ça…difficile!!!!
J’ai été puiser loin.
J’ai été chercher la petite fille en moi, celle qui lâche jamais. J’ai été chercher ma mère. J’ai été chercher le pourquoi.
Et quelque part entre Stovepipe et Whitney,
j’ai trouvé une paix que je n’avais jamais ressentie avant. Une boucle qui se fermait. Une réconciliation. Avec elle. Avec moi. Avec les années passées à chercher un sens et à me questionner sur plusieurs choses….
Ce que je retiens, ce n’est pas un chrono.
Le temps s’oublie.
La boucle prendra la poussière.
Même la ligne d’arrivée… je la revois floue. J’étais frigorifiée…
Ce que je retiens, ce sont des visages.
Des gestes. Des paysages.
Des silences remplis de sens.
Mon crew, présent, attentionné, solide.
L’équipe médicale qui m’a permis de continuer.
Les serviettes glacées.
Le regard de Maxime qui voulait tout dire.
Et ces sourires partagés à 3h du matin, entre coureurs qui n’avaient plus grand-chose à offrir… sauf des encouragements sincères…
Badwater. Ce n’était pas un exploit.
C’était une traversée humaine et plus qu’une expérience…
Et c’est peut-être ça, le plus grand cadeau.
Et puis y’a eu cette dernière montée.
Le Mont Whitney. La fin.
Je voulais que ça finisse.
Mais, je ne voulais pas que ça s’arrête non plus.
Parce qu’après, y’a plus ce rêve à poursuivre.
Plus de “un jour, je vais le faire…”
Et ça fait peur, même très peur…de devoir en trouver un nouveau…
J’ai pleuré. De douleur, oui…
Mais surtout d’émotion. D’appréhension.
Parce que ce moment que j’avais imaginé pendant si longtemps… allait devenir un souvenir.
Et maintenant?
C’est LA question qui reste….
On célèbre. On savoure.
Mais une fois l’euphorie passée…
Il reste ce vide…
Parce que ce rêve, ce n’était pas juste une ligne d’arrivée. C’était une boussole . Un moteur. Une raison. Et maintenant qu’il est accompli?
Maintenant, je réalise que ce n’était jamais la destination. C’était un passage…pour autre chose!!!
Alors non, je ne vais pas rêver plus grand.
Mais, je pense que je vais rêver autrement.
Revenir à ce que je veux vivre et à ce que je veux transmettre.
Parce que Badwater m’a rappelé que ce qui compte vraiment, ce n’est pas ce qu’on accomplit…mais qui on devient en chemin et les personnes que l’on rencontre à travers le tout!!
Alors la vraie question, ce n’est pas « Et maintenant? » C’est : « Qui ai-je envie d’être et de faire, maintenant que je sais que tout est possible? »
Créé avec © systeme.io • Politique de confidentialité • Mentions légales